« Ce sont de grandes fleurs mouvantes en voyage, des fleurs vivantes à jamais, et qui ne cesseront de croître par le monde… ».
Images à Crusoé,«
La Ville ».
La création poétique n’est pas seulement une histoire d’inspiration, Saint-John Perse pratique ce travail minutieux au quotidien, « pour mieux vivre ». Adossé à une imposante bibliothèque, l’écrivain-lecteur annote d’abord livres, dictionnaires mais aussi journaux, brochures et dépliants. Vient ensuite l’écriture, activité plutôt nocturne. Le poète évoque d’ailleurs dans Exil « les poèmes de la nuit avant l’aurore répudiés ». Mots et expressions, connaissances encyclopédiques glanés au fil des lectures, sont les matériaux des poèmes, œuvres sans cesse retouchées par l’auteur depuis les états manuscrits jusqu’aux éditions. Le vocabulaire des poèmes est souvent emprunté aux sciences, le rythme ample, le vers irrégulier mais harmonieux, le style dynamique marqué par l’ellipse et l’énumération.
Très jeune, il soumet sa graphie à une véritable rééducation comme le montrent les échantillons de textes publiés dans la « Pléiade ». Il s’agit d’en améliorer la lisibilité mais surtout d’atteindre une certaine perfection visuelle comme le révèlent les manuscrits, brouillons illisibles ou textes calligraphiés. Le texte enfin édité est soigneusement mis en scène sur l’espace de la page. Le choix délibéré de l’italique, l’utilisation du blanc, les exigences typographiques en font un objet graphique immédiatement reconnaissable. La qualité plastique du texte, l’aspect physique du livre, même pour une édition courante, revêt une telle importance pour Saint-John Perse qu’il se fait volontiers maquettiste.
L'écriture