Chronologie
1887 : Naissance à Pointe-à-Pitre
(Guadeloupe) de Marie René Auguste Alexis Leger, fils d’Amédée Leger,
avocat-avoué, et de Françoise Renée Dormoy, descendante d’une famille de
planteurs. L’enfant vit entre les deux « Habitations » situées sur la Basse
Terre, La Joséphine, près de la ville de
Basse-Terre, et
Bois-Debout, près de Capesterre.
1899 :En raison notamment de la dégradation de la
situation économique, politique et sociale en la Guadeloupe, Amédée Leger prend
la décision d’emmener sa famille en France métropolitaine
. La famille Leger (Alexis, ses trois sœurs et sa grand-mère
paternelle, Augusta) s’installe à Pau. Alexis entre au lycée en cinquième.
1902 : Rencontre du poète
Francis Jammes, le « cygne d’Orthez ». Ils partageront la même nostalgie de
leurs origines guadeloupéennes (le père de Jammes est né en Guadeloupe, son
grand-père y est enterré, à Goyave) et le même attachement à la poésie virgilienne des
Géorgiques. Alexis Leger lui fera lire ses premiers
manuscrits. Grâce à Jammes,il fera la connaissance de Gabriel Frizeau,
riche mécène bordelais, qui lui fera découvrir Odilon Redon et surtout
Gauguin
,
mais
aussi de Claudel et de Gide.
1906 : Après son
service militaire, Alexis entreprend à Bordeaux des études de philosophie et de
droit. Il traduit Pindare. Chez Frizeau, il rencontre Jacques Rivière.
1907 :
Mort brutale de son père. Alexis
Leger, à 20 ans, assume la lourde responsabilité de chef de famille.
Interrogé
par Jacques Rivière sur son éventuelle vocation d’écrivain, Leger répond
fermement qu’il « n’y a rien à attendre [de lui] littérairement. ». Il avait
pourtant déjà composé la plupart des poèmes du futur recueil Éloges. Et, dans la N.R.F. d’août 1909, il publie « Images à Crusoé ».
Assiste avec passion aux concerts dirigés par Édouard
Brunel, en donne le compte rendu dans La Gazette de Pau, se sent proche de la
vogue musicale néo-classique de la Schola Cantorum.
1911 : Éloges , éditions de la NRF sous la
signature SaintLeger Leger. Le volume comprend « Écrit sur la porte », « Pour fêter
une enfance », « Récitation à l’éloge d’une Reine » (publiés tous trois dans la NRF
en 1910) et « Éloges », poème en 18 chants.
1912 :
Installation de la famille à Paris. Sur le conseil de Claudel, il choisit la
carrière diplomatique.
1914 :
Succès au
concours des Affaires étrangères.
1915 :
Attaché au
service de la Maison de la Presse, fondé par Philippe Berthelot, directeur des
affaires politiques au ministère des Affaires étrangères.
1916 :
Envoyé à sa propre demande en Chine où il sera
d’abord troisième puis deuxième secrétaire à la Légation de Pékin.
Séjournant dans un temple taoïste, à une heure à
cheval de Pékin, il entreprend d’écrireAnabase.
1920 : Expédition en Mongolie-Extérieure et traversée du désert
de Gobi en compagnie du sinologue Gustave-Charles Toussaint.
Ne
parvenant pas à obtenir son détachement du ministère des Affaires étrangères
pour être conseiller politique auprès du gouvernement chinois, il demande à être
rappelé à Paris.
Retour par le Japon et l’Amérique.
1921 :
Nommé
comme expert politique à la conférence internationale de Washington sur la
limitation des armements et les questions d’Extrême-Orient. Il y est remarqué
par Aristide Briand, Président du Conseil, grâce à la protection duquel il
grimpera rapidement les degrés successifs d’une brillante et singulière carrière
diplomatique, en ce sens qu’elle se fit exclusivement à l’Administration
centrale : successivement directeur adjoint, puis directeur des Affaires
politiques et commerciales, chef de cabinet du ministre, et enfin secrétaire
général du Quai d’Orsay entre 1933 et 1940 en remplacement de Philippe
Berthelot. Cette situation, considérée par certains comme un privilège indu, lui
valut de nombreux ennemis.
1924 :
Publication d’Anabase aux
Éditions de laN.R.F.
et d’« Amitié du prince »
dans le Cahier I de
Commerce,
revue fondée par la princesse de Bassiano.
L’auteur a choisi son pseudonyme définitif, Saint-John
Perse, qu’il abrègera quelquefois en St.
John Perse
. Au-delà de ses énigmatiques
références, ce choix entend marquer
une ligne de frontière entre le diplomate et le
poète.
Jusqu’en 1940, le diplomate semble avoir obtenu raison du poète. Aucune nouvelle publication. Paraissent seulement des traductions d’Anabase en russe (par Adamovitch et Ivanoff, 1926), en allemand (B. Groethuysen et W. Benjamin, 1929), en anglais (T. S. Eliot, 1930), en italien (G. Ungaretti, 1931), en roumain (Ion Pillat, 1932).
Mai 1940
: L’entrée des Allemands à Paris fait souffler un
vent de panique sur un ministère des Affaires étrangères dont l’autorité avait
été ébranlée, depuis les accords de Munich, par les différends entre bellicistes
et pacifistes, les intrigues de couloirs et les démissions successives des
ministres. Le renvoi de Leger est imposé par Paul Reynaud, président du Conseil,
au Président de la République, Albert Lebrun, en hâte, le soir du 18 juin. «
Étrange milieu où tout le monde s’utilise et où tout le monde se trahit à la
première occasion et le sait. » (Boyer de Sainte-Suzanne)
Leger refuse l’offre de l’ambassade de Washington et
s’exile aux États-Unis, via Londres, où il rencontre Winston Churchill.
En octobre, il est déchu de la nationalité française et
radié de la Légion d’honneur par le gouvernement de Vichy.
Peu après son arrivée, il rencontre Archibald MacLeish,
directeur de la Bibliothèque du Congrès et poète, qui lui offre un poste de
consultant littéraire à mi-temps. Il décline toute autre activité rémunérée et
parle à son entourage de retraite, de solitude extrême, de silence et de repli.
Grâce aux Biddle cependant, il entre en contact avec
l’entourage politique du président Roosevelt et cherchera à jouer un rôle de
conseiller auprès de celui-ci.
1941 :
Pendant l’été, en villégiature chez les Biddle à
Long Beach Island, il écrit « Exil ». Il s’installe à Washington D.C. dans le quartier
de Georgetown, non loin de Lilita Abreu avec qui il avait déjà entretenu
une liaison à Paris et à qui sera plus tard dédié, discrètement, « Poème à
l’étrangère ».
Des représentants de la France libre
viennent lui demander une caution qu’il refuse de donner. Parallèlement, il
s’emploie à dénoncer les agissements du gouvernement de Vichy auprès des
Américains.
mai 1942 :
Publication d’« Exil » dans la revue Poetry et aux Cahiers du
Sud (Marseille). Gallimard en publie une édition clandestine tirée à 15
exemplaires signée S.J.P.
Il reçoit en mai une invitation personnelle du général de Gaulle à venir «
conférer » avec lui à Londres. Leger ne met pas longtemps à répondre : le
diplomate qu’il est ne « saurait assumer que la direction
d’une activité diplomatique ». Sa réponse tait l’extrême défiance que lui inspire l’état
militaire de son correspondant. Il réitérera à plusieurs reprises son refus.
Été après été, il séjournera dans une île privée des côtes
du Maine chez Béatrice Chanler « Seven hundred acre island ». Excellent marin,
il navigue entre les îles de la côte Est. Ces navigations seront l’autre rite de
l’été.
été 1943 : « Poème
à l’étrangère », écrit en 1942,
est publié sans dédicace dans le premier numéro de la revue Hémisphères . Le poème sera perçu par Lilita comme «
un don avant la rupture ». « Pluies » est publié en octobre grâce à Roger Caillois
dans la revue Les Lettres françaises, Buenos
Aires.
juillet 1944 : « Neiges », dédié à la mère du poète, paraît dans le n°
13 desLettres
françaises.Sous le
titre Quatre poèmes 1941-1944, les poèmes
précédents seront publiés aux Éditions des Lettres françaises, Buenos Aires la
même année, avec une note liminaire d’Archibald MacLeish rédigée en étroite
collaboration avec Saint-John Perse.
Leger est replacé comme Ambassadeur en
disponibilité dans le service diplomatique.
1945 :
« A la suite
d’un voyage dans les États de l’Ouest américain, il se passionne pour la
géologie, la faune et la flore. Le grand poème Vents
, écrit pendant l’été 1945 à
« Seven hundred acre Island », proposera à son tour le récit de la traversée
d’Est en Ouest d’un cavalier qui à lui tout seul résume tous les âges.
1946 :
Publication chez Gallimard de Vents.
Le contrat signé avec la
généreuse Fondation Bollingen (mécénat de Mary Mellon) lui permet de subvenir à
ses besoins. En échange de la subvention allouée, Leger s’engage à accorder à la
Fondation l’exclusivité de l’édition de ses œ
uvres traduites en langue
anglaise.
1947 : Il refuse
le poste d’ambassadeur à Washington que lui propose le Président Vincent Auriol.
Il fera de même avec toute autre proposition de renouer avec la vie politique
française et revendiquera un statut d’exilé jusqu’en 1958, comme le prouve
l’intitulé « Lettres d’exil » attribué à la correspondance de la guerre et de
l’après-guerre.
1948 :
Le premier fragment d’un poème
consacré à la mer est publié au printemps par l’intermédiaire de Jean Paulhan
dans les
Cahiers de la Pléiade,
sous le titre « Poème »,
qui deviendra le chant VIII de la Strophe d’Amers. Le futur grand poème continuera à être publié
par fragments en revue jusqu’en 1957.
1957 :
Publication d’Amers chez
Gallimard. Constitué d’une « Invocation », de 9 strophes, d’un « Chœur
» et d’une « Dédicace », le poème associe la mer à la célébration de
l’amour.
En 1962,
Saint-John Perse veillera à la fabrication d’une somptueuse édition du
poème publiée
par les Bibliophiles de Provence. Impression assurée à Paris par
l’imprimerie nationale en
caractère « Romain du Roi » de Grandjean (1699).
A partir de mai de cette année il partagera son année entre
les États-Unis (hiver et printemps) et la presqu’île de Giens dans une
propriété, les Vigneaux, que Mina Curtiss a acquise à son intention et dont elle
lui a fait don.
1958 : Épouse à
Washington Dorothy Milburn, d'une « famille américaine de vieille souche
anglaise », précise-t-il dans la Biographie de la Pléiade, non sans un certain
snobisme. Il a 70 ans, mais il a gardé une belle allure sportive.
octobre 1959 :
Publication de Chronique
dans les Cahiers du Sud puis chez Gallimard en 1960. « Grand Âge, nous voici… ».
1960 : Prix Nobel
de littérature. Publication de l’allocution de Stockholm sous le titre Poésie.
1962 :
Publication
par la Société des Éditions d’Art « au Vent d’Arles » de l’édition originale
d’Oiseaux, dans laquelle se répondent poèmes de
Saint-John Perse et eaux-fortes de Georges Braque.
1963 :
A
partir de cette date et jusqu’en 1967, il fait chaque été une croisière en
Méditerranée sur le yacht Aspara appartenant à un de ses amis. Un carnet de
notes, rédigé au cours de la croisière de l’année 1967 autour des Iles
Éoliennes, a échappé miraculeusement à la destruction des inédits qu’il avait
souhaitée. Il a été publié en 1987 dans la série Cahiers Saint-John Perse,
n° 8-9, Gallimard.
janvier 1969 : Publication dans La Nouvelle Revue française d’un court poème, « Chanté par Celle qui fut là », présenté par le poète comme « un hommage à Diane Saint-Leger Leger. »
septembre 1971 : Publication dans La Nouvelle Revue française de « Chant pour un equinoxe ».
novembre 1972 : Publication du volume de la Pléiade des Œuvres complètes de Saint-John Perse composé entièrement par ses soins.
janvier 1973 : Publication dans La Nouvelle Revue française de « Nocturne » : Les voici mûrs ces fruits d'un ombrageux destins [...] fruits du long souci, ils sont fruits du long désir [...] Nous n'y trouvons point notre gré.
juin 1974 : Publication
dans La Nouvelle Revue française de « Sécheresse ». L’inspiration poétique en s’amenuisant
fait le récit de ce tarissement. Dernière ligne, férocement ironique : Singe
de Dieu, trêve à tes ruses !
20 septembre 1975 :
Mort de Saint-John Perse.
Il repose dans le petit
cimetière marin de Giens.
Peu avant sa mort, sur l’instigation de Pierre Guerre,
avocat et homme de lettres marseillais, le poète a donné l’ensemble de ses
collections à la Cité aixoise. LaFondation
Saint-John Perse sera créée en
1976.