Hommage à Thieri Foulc

Le 13 mars dernier, quelques personnes s’étaient réunies à la Fondation Saint-John Perse autour de Thieri Foulc. C’était le jour de l’inauguration de l’exposition qu’il présentait, à l’invitation de Muriel Calvet. Il l’avait, avec l’aide de Jade Gravot et de Romain Mari, minutieusement préparée et il s’en réjouissait beaucoup à l’avance.
Quelques personnes seulement… Car ce 13 mars n’était pas un jour comme les autres. L’entrée dans le confinement était décrétée. Elle avait déjà provoqué l’absence d’Arrabal, si attendu à Aix-en-Provence. Je n’oserais dire que ce fut le dernier « bonheur » de Thieri Foulc. Ce fut en tout cas sa dernière prestation publique, aussitôt occultée, mais de nouveau accessible. Les visiteurs le retrouveront à travers les œuvres choisies, aussi surprenantes que l’était la personnalité de celui qui les avait réunies.
Je ne saurais en quelques lignes décrire cet homme exceptionnel, écrivain, dessinateur, peintre, érudit, éditeur, membre de l’Oupeinpo et du collège de ‘Pataphysique, dont il était devenu Satrape. Les dernières années de sa vie lui furent presque entièrement consacrées.
Si Thieri Foulc était un homme des plus sociables, en contact étroit avec de nombreux artistes et savants qui se côtoyaient naguère dans son atelier de la rue du Volga à Paris, il n’en restait pas moins un homme des plus discret, voire secret. À l’Oupeinpo, il avait pu mettre à l’épreuve son goût de ce qui est à la limite du possible. Ses œuvres graphiques, dont l’admirable Massacre des innocents, laissent entrevoir un arrière-monde inquiétant. Parmi ses derniers textes, le jeu avec les oxymores (Peintures non peintes), sa recherche des défis (Tentatives à la limite), sa pseudo-autobiographie (Le Lunetier aveugle, en récital au théâtre de la Huchette), témoignaient de sa proximité intellectuelle avec l’Oulipo, avec un art du dire sans dire, du faire sans faire, assez vertigineux. Il ne cessait d’interroger les processus même de la création, faisant de cette interrogation même une œuvre véritable, parce qu’il dominait parfaitement ses outils : l’écriture, la peinture, le dessin.
Toujours d’une élégance raffinée, mais non conventionnelle, amateur de bonne chère et de vins exquis, il aimait parler devant ses amis, expliquer, instruire. Pour ne pas laisser l’exposition sans spectateurs, il avait accepté de commenter par écrit un certain nombre de tableaux exposés. Ces textes ont été publiés sur Internet par la Fondation. Ils restent irremplaçables et malheureusement inachevés. J’espère qu’ils seront joints aux tableaux lors de la réouverture.

– Claude Debon

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