Denis de Rougemont
« figuration scientifique de l’homo europeanus ».
La formule est de Saint-John Perse. On la trouve dans un hommage à Denis de Rougemont (1906-1995) en tête de l’ouvrage Denis de Rougemont : l’écrivain, l’européen, publié à l’occasion du 70e anniversaire de sa naissance, en 1976 donc, aussi ne figure-t-il pas dans les Œuvres complètes du poète-diplomate. C’est apparemment le dernier texte qui soit sorti de sa plume. Titre de cet hommage : Denis de Rougemont l’occidental.
Denis de Rougemont est considéré comme l’un des grands penseurs pionniers de l’idée d’instituer, non pas seulement « une sorte de lien fédéral », mais un fédéralisme européen et un des principaux représentants du fédéralisme intégral.
Alexis Leger et Denis de Rougemont ne semblent pas s’être rencontrés avant 1942, à Washington, puis à New York à l’occasion de la manifestation à la mémoire de Briand organisée le 28 mars par leur ami commun, Coudenhove-Kalergi. La première des lettres qu’ils ont échangées, conservées par la Fondation Saint-John Perse, date du 12 janvier 1942, la dernière de juillet 1975, soit bien peu de jours avant la mort du poète.
Rougemont était arrivé aux Etats-Unis fin août 1940, soit un peu plus d’un mois après Alexis Leger et s’était installé près de New York en octobre de la même année. Un article très polémique dans la Gazette de Lausanne (« A cette heure où Paris…. »), suite aux protestations et aux pressions du Gouvernement allemand, lui avait valu les foudres du Gouvernement suisse. Condamné pour insulte à chef d’État étranger à quinze jours de prison militaire, il s’arrange pour se faire envoyer aux États-Unis au prétexte d’y donner des conférences sur la Suisse.
Dans son livre de souvenirs, Journal des Deux Mondes, paru en 1946 (réédité en 1948 chez Gallimard, Saint-John Perse avait cette édition dans sa bibliothèque), Denis de Rougemont évoque le discours qu’Alexis Leger a prononcé sur Briand en 1942 à New York, « prononcé sans regarder ses notes », écouté par lui avec une émotion soutenue et où il reconnaît « une grande prose musicale qui n’est pas indigne du poète d’Exil et d’Anabase ».
Le passage est cité dans Honneur à Saint-John Perse (1964) mais n’a pas été repris dans le volume de la Pléiade.